Accueillir l’incertitude!

Voici le deuxième article de Rosette Poletti que j’ai choisi de vous partager. Il n’a pas pris une ride depuis sa parution en 2005! Et il s’adapte tout à fait à ce que nous vivons en cette période de déconfinement car l’incertitude est plus que jamais au rendez-vous et à tout niveau ! Personnellement, je me pose beaucoup de questions sur mon avenir professionnel, sur mes relations sociales, l’avenir de mes enfants mais également sur notre façon de vivre et notre planète. Je ne vous cache pas que certains jours, je suis anxieuse et que je ne suis pas très optimiste pour l’avenir mais j’essaie de garder « la tête hors de l’eau » en me focalisant sur l’ici et maintenant tout en accueillant l’incertitude qui peut m’habiter et en faisant confiance à la petite flamme et la force qui résident au fond de mon cœur.

Prenez bien soin de vous…

Accueillir l’incertitude !

Article paru dans Le Matin Dimanche du 08.05.2005

« Mon mari a perdu son travail et il vit très mal cette période de chômage. Notre fils attend une confirmation pour une place d’apprentissage, mais rien n’est sûr pour le moment. Moi je fais de la réflexologie à domicile, mais je ne sais pas comment les choses vont évoluer, car il y a de plus en plus de gens qui pratiquent et qui offrent cette technique. Toutes ces incertitudes me pèsent, je prends des tranquillisants sans voir beaucoup d’effets. Comment font tous ceux qui ont à vivre l’insécurité ? Y a-t-il des trucs que je ne connais pas ? »

Rien n’est sûr, en effet. On pense parfois que c’est le propre du temps que nous vivons, rien n’est moins certain. Dans le petit ouvrage d’Alan Watts « Eloge de l’insécurité », publié en 1951, nous pouvons lire : « (…) ainsi avons-nous le sentiment que nous vivons une époque d’inhabituelle insécurité… Comme les années passent, il semble y avoir de moins en moins de rochers auxquels s’accrocher. » Cinquante ans plus tard, nous avons le même sentiment, nous invoquons les changements technologiques, le démembrement des familles et des communautés, la diminution de l’influence des religions traditionnelles, la construction de l’Europe, tant de modifications nous inquiètent et contribuent, nous semble-t-il, à alimenter la crainte que nous pouvons ressentir face à l’avenir.

La réalité

La réalité qu’il nous faut accepter, c’est que tout change, que nous n’avons aucun contrôle sur l’avenir, que « se faire du souci » n’a jamais apporté de solutions aux difficultés de la vie.

La réalité, c’est que l’incertitude et la peur de l’avenir sont diminuées lorsqu’on apprend à porter son attention sur le présent, sur l’ici et maintenant.

La réalité, c’est qu’on vit mieux l’incertitude lorsqu’on a su créer un réseau d’amis et de proches.

La réalité, c’est que plus on est calme, paisible à l’intérieur de soi, plus on peut voir émerger des solutions, plus on peut aller de l’avant avec confiance.

La réalité, c’est que chacun de nos jours est précieux et, une fois écoulé, ne reviendra plus jamais.

Il est vraiment dommage de polluer de belles journées de printemps avec des soucis au lieu de jouir des instants passés avec ceux qu’on aime.

Facile à dire, penseront certains lecteurs ! En effet, c’est plus facile à dire et à écrire qu’à vivre. Pourtant, lorsqu’on perd ceux qu’on a aimés, lorsqu’on prend pleinement conscience de la brièveté de la vie, il arrive de regretter toutes les « pollutions » qui ont troublé ces moments passés ensemble.

Comment faire face à l’incertitude ?

Susan Jeffers, une chercheuse qui a particulièrement étudié le phénomène de l’incertitude et écrit sur le sujet, propose un certain nombre de moyens.

« Je me demande… »

Le cours de la vie est incertain, et aucun de nous ne sait exactement ce qui est bon pour lui. Certaines attentes que nous pouvons avoir et qui ne se réalisent pas ouvrent la voie à quelque chose que nous n’aurions jamais imaginé et qui est beaucoup plus important pour nous.

Au lieu de se dire : « J’espère que ça va marcher » ou « J’espère qu’il aura une réponse positive », Jeffers propose plutôt : « Je me demande ce qui va arriver » ou « Je me demande quelle nouvelle nous allons recevoir ».

Lorsqu’on peut adopter cette attitude face à la vie, une énorme « pression » disparaît, et l’esprit peut être en paix, le désir de contrôle sur les événements diminue.

Il ne s’agit pas d’être un spectateur passif. Si l’on cherche un travail, il faut faire des offres, prendre des rendez-vous augmenter ses compétences. Cependant, lorsqu’on a fait ce qu’il fallait, la meilleure attitude est celle du semeur qui sait qu’il a mis des graines en terre et qui fait confiance à la dynamique de la croissance : « Je me demande comment cette plante se manifestera ! »

La valeur du doute

Léon Tolstoï écrivait : « La seule chose que nous sachions est que nous ne savons rien et il s’agit là du plus haut niveau de la sagesse. »

Savoir que nous ne savons rien, que nous voyons la vie à partir de notre petit angle de vue seulement a quelque chose de libérateur. Pourquoi devons-nous vivre une situation difficile, pourquoi nous ? Pourquoi maintenant, nous n’en savons rien. Nous ne savons rien de la grande histoire de l’univers dans laquelle nous sommes une minuscule petite pièce unique et indispensable.

Nous vivons dans un monde de contrôle où l’on nous dit : « Quand on veut, on peut » ou « Tu n’as qu’à t’en donner les moyens » ! Alors nous vivons dans la tension, l’angoisse, et les entreprises pharmaceutiques qui fabriquent des tranquillisants font fortune !

Essayons donc autre chose, acceptons le doute, l’incertitude :

  • Calmons notre esprit.
  • Acceptons que nous ne savons rien.
  • Apprenons à être flexibles, ouverts.
  • Apprenons à nager avec le courant plutôt qu’à nous accrocher à des « certitudes » qui n’ont plus cours.
  • Écoutons notre intuition.
  • Apprenons à faire confiance à la vie : « Je sais profondément que ce qu’il y a de meilleur se manifestera et je maintiens en moi ce centre de calme, de sérénité. Je sais profondément que je serai capable de faire face à ce que demain m’apportera. J’apprendrai de cette situation, je grandirai, je trouverai un moyen d’enrichir ma vie. »

Voilà des phrases qu’il est utile de se répéter, qui peuvent apporter un sentiment de paix et de confiance.

Rosette Poletti et Barbara Dobbs

À lire :

« Mieux vivre avec le stress – Un livre de recettes pratiques »
Ariel P. Haemmerlé, Ed. Vivez Soleil, 2003

« Eloge de l’insécurité »
Alan W. Watts, Petite Bibliothèque Payot, 2003

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